Le piège de la rupture conventionnelle de contrat de travail.
On ne reviendra pas sur les aspects techniques de la rupture conventionnelle du contrat de travail (RCCT). Si ce n’est repréciser les fondements à savoir que la RCCT permet à l’employeur et au salarié de convenir en commun de la rupture du contrat de travail. N’étant ni un licenciement, ni une démission, elle échappe aux règles du licenciement et n’a donc pas à être motivée. Mais elle offre au salarié une indemnité au minimum égale à l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement et ouvre droit aux allocations chômage.
Sous ces airs de simplicité et d’assouplissement des relations de travail se cache un véritable piège pour les salariés et pour la collectivité en général.
Déjà, la RCCT renforce le caractère déséquilibré de la relation de travail. En effet, si le salarié est à l’initiative de la demande de RCCT, il est à craindre que l’employeur le contraigne à la démission pour ne pas avoir à payer l’indemnité de rupture. En revanche, lorsque l’employeur voudra se séparer d’un salarié qu’il considère indésirable (pas assez productif, trop coûteux, trop contestataire), il a tout le loisir d’interpeller ledit salarié en lui mettant en avant des soi-disant fautes ou manquements et dans la foulée de lui proposer une RCCT à la place d’un licenciement pour faute. En clair, mieux vaut se séparer à « l’amiable »… ça fait moins mauvais effet auprès des amis, des autres collègues, de la famille…qu’un licenciement pour faute !!! Cerise sur le gâteau, en agissant de la sorte, il est beaucoup plus facile pour le patron de faire accepter les termes (financiers…) de la convention. Bref, plus besoin d’avoir une « cause réelle et sérieuse » pour mettre fin au contrat de travail ; une bonne dose de pression, un soupçon d’indemnité, l’assurance de toucher des Assedic et le sale-tour est joué. La recette est d’une grande simplicité…
De plus, imaginons un salarié victime de discrimination, de harcèlement, de conditions de travail indignes et illégales et qui, de part cette situation intenable, préfère accepter les modalités d’une RCCT plutôt que de faire valoir ses droits devant les autorités compétentes : on l’a vu ci-dessus, non seulement il peut ne pas être totalement rempli de ses droits (droit à la formation, indemnités financières) mais en plus l’employeur, non condamné, peut continuer d’exercer ses délits, comme si de rien n’était…
Et puis, que dire de ces patrons d’entreprise qui vont proposer des RCCT par petits paquets dans le temps, et qui, ce faisant écarte la procédure de licenciement économique et l’obligation de reclassement individuelle (pour les entreprises de + de 50 salariés). Que dire également de ceux qui usent et abusent de cette convention pour « remercier » les salariés les plus âgés de l’entreprise, les jugeant plus assez rentable. Ce faisant, l’entreprise rejette son devoir et sa responsabilité de permettre aux individus de vivre dignement et correctement de son salaire durant la totalité de sa vie professionnelle. C’est en effet trop facile de s’enrichir pendant des années de l’exploitation de ses employés pour ensuite, parce qu’on les juge contre-productif, passer le « relai » à la collectivité via l’indemnisation chômage.
On le voit aisément, la RCCT est une arme supplémentaire dans l’arsenal déjà bien fourni du MEDEF.
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